Une fracture Net
Cécile Thomas pilote l’association nantaise Médiagraph. Elle soigne la fracture numérique de celles et ceux qui n’ont pas encore apprivoisé Internet et tous les outils informatiques.
On n’a pas tous les jours vingt ans. Pardon, le web n’a que vingt ans ? Oui. Mais il n’empêche que tout le monde n’a pas encore eu l’occasion d’apprivoiser un ordinateur, ce drôle d’animal un peu inquiétant parfois, qu’il faut savoir caresser dans le sens du pixel. Pas de panique ! Tout s’apprend avec un peu de confiance. Surfer sur les réseaux sociaux, tel Facebook, en toute sécurité, créer des flyers grâce à un logiciel de publication assistée par ordinateur (PAO), utiliser un téléphone mobile ou une tablette…. Chaque fois que quelqu’un a envie d’apprendre à se servir d’un outil numérique, les portes de l’association Médiagraph, située à Nantes, près de la place Viarme, s’ouvrent sur le visage de Cécile Thomas.
Aiguiller les gens
« Nous accueillons beaucoup de gens issus de tous horizons, de l’ouvrier d’une entreprise d’insertion à la retraitée de Canclaux, du petit enfant de six ans au vieux monsieur de quatrevingt- cinq ans, notre doyen. Même les geeks viennent nous voir ! » raconte Cécile Thomas, directrice et cofondatrice depuis 1996 de Médiagraph. On travaille à la fois dans le champ du numérique et celui de l’économie utile, sociale et solidaire. Mais social n’implique pas forcément l’idée de précarité. Les gens qui viennent vers nous ont des points communs. Ils se sentent loin du monde de l’informatique, se demandent comment prendre en main leur smartphone ou bien ont peur des réseaux sociaux. Nous sommes là pour aider les gens, dit-elle simplement. Et les aiguiller sur la bonne voie, c’est-à-dire celle qui leur convient. »
Pour arrondir les angles des ordinateurs
Médiagraph a tout d’une petite entreprise de services « à la carte », vendus à des tarifs défiant toute concurrence. Avec plus de 250 adhérents, cette association s’autofinance à 71 % et bénéficie du soutien de Nantes Métropole et de la Ville de Nantes. Elle propose des ateliers pour les plus de 50 ans, des formations accompagnées, dédiées spécifiquement aux structures de l’Économie sociale et solidaire (ESS), telles les entreprises de réinsertion Réagir Ensemble à Bouguenais, des matinées de sensibilisation à la culture numérique, des balades numériques, par exemple au Château-des-Ducs à Nantes… Les maîtres mots de Cécile Thomas, passionnée au long cours, autant par les progrès technologiques que par les rencontres humaines et l’entreprenariat : agir avec pragmatisme, pour mieux arrondir les angles des ordinateurs. Les pixels pour cela sont magiques.
En finir avec la fracture numérique
Médiagraph fait également sauter quelques tabous. Internet, ce n’est pas seulement pour les jeunes, mais pour toutes les générations, les ordinateurs, pour les hommes comme les femmes. « Aujourd’hui, il y a très peu de personnes qui ne savent pas ce qu’est le web. Un ami ou un proche leur a montré. Est-ce que quelqu’un qui n’a jamais appris à naviguer sur Internet ne sait pas pour autant ce que c’est ? Est-il exclu, c’est-à-dire en fracture numérique ? » s’interroge Cécile Thomas, arrivée à Nantes à l’âge de 16 ans en 1985. La fracture numérique serait ainsi plus dans l’usage (comment s’en servir) que dans l’accès (j’ai un ordi, un smartphone, etc.). « Internet fait partie de la vie en société, dit-elle, c’est une liberté ! »
L’ordinateur, avec ses millions de pixels sur l’écran, n’est jamais très loin dans la vie de Cécile Thomas. En regardant de près les tapisseries qu’elle réalise à ses heures pas si perdues que cela, à partir d’images de télévision ou de vidéosurveillance, on comprend vite que passer du pixel au point de canevas est pour elle un « grand kiff » !
Cécile Faver